Fête des mères, fête des pères



Pour nos papas et mamans, NhaTrang a été un havre de paix après une jeunesse passée sous le joug d'un protectorat français à ses dernières années de règne: l'invasion japonaise, la famine avec ses centaines de milliers de morts jonchant les rues des villes, l'armée française opérant des raffles chaque nuit quartier par quartier à la recherche des opposants, la population fuyant les villes pour se réfugier dans les villages où elle fut, comble d'horreur, témoin des séances d'autocritique ...


Le  bouquet final fut la décision capitale, chacun en son âme et conscience, n'osant entraîner dans ce périple ni parent ni ami: tout abandonner derrière soi et se diriger vers le sud du 17è parallèle, vers des contrées inconnues, vers un avenir incertain,  par simple refus d'une certaine vision de la vie et de la socìété.


Nos parents avaient à peine trente ans pour les plus vieux d'entre eux! Ils sont passés à NhaTrang et, émerveillés devant tant de beauté et de quiétude, décidèrent d'y poser leurs bagages. La ville et sa population les ont accueillis et adoptés. Leur vie dans cette ravissante ville côtière était féerique, loin des bruits et trépidations de la capitale, épargnée des bombes et ravages de la guerre. Leurs enfants y sont nés et y ont grandi.


Leur vie à NhaTrang  s'écoulait, languissante, comme un long fleuve tranquille jusqu'au jour où, cette idéologie qu 'ils pensaient avoir laissée définitivement derrière eux, les rattrapa vingt ans après: la mort dans l'âme et la peur dans le ventre, ils allèrent  plus loin dans le sud, encore plus loin pour certains, même les océans ne purent les arrêter.


Ils sont à présent au crépuscule de leur vie, certains nous ont quittés. Ils avaient refait leur vie, éparpillés aux quatre coins du monde.


Mais c'était à NhaTrang qu'ils ont connu les années les plus heureuses de leur vie.


Trương Bích Diệp



© cfnt, Collège Français de Nha Trang