Les malheurs de Sophie
(alias Tiên Sa)


SOUVENIRS D'ENFANCE


Mes souvenirs remontent assez loin dans mon enfance: Avant mon entrée à la Maternelle.


J'ai gardé en mémoire la scène où le Maître de la Maternelle m'a soulevée par une oreille, ce qui m'a fait tellement mal que ça m'a marquée à vie! J'ai dû être un enfant terrible - malgré un visage d'ange, car on m'a raconté que bébé déjà, j'ai dû être attachée au pied du lit pour ne pas semer la pagaille partout, dans la maison, surtout là où il y avait des livres!


Un autre mauvais souvenir: Les Tables de multiplication: Je suis tombée sur une maîtresse qui aimait bien châtier, aucune hésitation n'est permise, sinon une pluie de coups de règles sur les mains - toutes les règles des élèves ramassées pour la punition! Une seule fois, j'ai reçu ces marques terribles sur mes paumes et c'était trop dur à supporter pour mon père qui a obtenu le renvoi immédiat de cette enseignante.


Un jour, on m'a envoyée en mission: Aller jusqu'à l'horloge de l'école primaire pour dire quelle heure il était. Mission Impossible: Je me suis rendue compte que je ne savais pas lire l'heure. Paniquée, j'ai tourné en rond dans la cour avant de décider d'inventer, à ma façon, l'heure demandée! Apparemment, je me suis bien débrouillée  : Ouf, mon amour-propre sauvé, ce jour-là!


J'étais fâchée, à l'époque, avec les Mathématiques, car je n'aimais pas les complications: Pourquoi faire remplir une baignoire pour nous obliger à trouver la réponse ou  Combien de temps faudra-t-il pour que les deux trains se croisent etc....


Avec réticence, j'ai quand même passé et réussi mon Certificat de Fin d'études primaires.


Mes meilleurs moments, c'était les jeux pendant la récréation: Je suis née pour jouer, vagabonder avec les autres enfants comme une sauvageonne plutôt que pour les études sérieuses. Je marchais la plupart du temps pieds nus, comme mes pauvres compagnons de jeux, ne mettant les chaussures que pour faire éclater les bulles de goudron de la chaussée qui fondait sous l'effet de la chaleur torride de l'été!


Le goûter, un régal pour les enfants que nous étions, ma soeur et moi, après l'école: des galettes de riz juste humidifiées et dégustées avec bonheur, accompagnées d'une bonne sauce de " Nước mắm " aux piments! Sans compter les fruits comme le tamarin, la mangue... Surtout la mangue qui évoquait des plantations où nous avons pu savourer des variétés et à toutes les sauces!


Avant Nha Trang, je ne connaissais aucun dentiste, sauf ma mère: Elle nous arrachait les dents, soit par surprise, en ayant la bouche ouverte innocemment, soit la dent - victime du bourreau qu'était ma mère - liée à une ficelle, attachée à une poignée de la porte qu'on bouge et hop, envolée avec des gémissements ou cris de douleur!


Quant aux oreilles percées: Il n'était pas question de nous laisser faire sans monnayer quelque récompense: On nous piquait les oreilles avec une épine quelconque - méthode naturelle, sans coût - et en attendant la cicatrisation, on y mettait des bouts de paille provenant de nos nattes!


Dans le but de devenir une grande fille et en bonne santé, j'ai dû avaler force cuillerées d'huile de foie de morue, en échange de sucreries ou de quelques pièces d'argent. Le résultat était plutôt décevant car j'ai toujours été la plus petite de la classe! Quelle arnaque, n'est-ce pas!


LOISIRS & DIVERTISSEMENTS


Enfant, j'ai assisté à des projections en plein air: des documentaires concernant l'hygiène, la santé afin d'éviter les parasites tels que poux, amibes, taenia ( ver solitaire )... A l'époque, j'habitais une petite province où les distractions manquaient. Le week-end, c'était un luxe d'aller au cinéma: Mes parents nous laissant sous la bonne garde des servantes - deux soeurs - placées en principe à vie dans une famille bourgeoise comme la nôtre, à cause de la pauvreté de leur foyer - elles nous emmenaient souvent voir des films hindous ou chinois. Ce n'était pas mon passe-temps favori, loin de là: A notre retour, après chaque sortie, j'étais obligée de vérifier s'il n'y avait pas de fantômes - chinois - ou de cobras - hindous, sous les chaises ou dans la chambre, sous mon lit au moment d'aller me coucher! 


Il faut reconnaître que mon petit frère était tout aussi trouillard que moi, à cause de toutes ces histoires de fantômes!


Plus tard, j'ai détesté le " Hát Bội " - Opéra de Pékin, étant trop impressionnée par les personnages aux airs menaçants dûs au maquillage. La salle de théâtre même me donnait la chair de poule rien qu'en passant devant.


Ce n'était qu'à Sài Gòn que j'ai pu apprécier de bons films et dans de grandes salles: De vraies sorties pour moi, sans passer par l'autorisation paternelle! Etant étudiante, j'ai vécu chez ma tante et profitais de cette chance de pouvoir me déplacer à ma guise!


Dès le déménagement et l'installation de ma famille à Sài Gòn, je me suis retrouvée enfermée dans ma prison dorée.


Afin de m'échapper pour retrouver ma bande de copains dans des soirées dansantes - boîtes de nuits, cabarets...., j'ai dû planquer mes vêtements chez des copines et sortir en cachette! Malgré l'heure tardive, mon père restait devant la grille de la maison à guetter le retour de l' " Enfant Terrible"! Avec un bâton à la main! Etant la fille aînée d'une famille nombreuse, j'ai eu droit aux " corrections " pour servir d'exemple à mes chers jeunes frères et soeurs!


Mon cher Papa, tu n'aurais pas dû t'alarmer ainsi à l'époque de mes fréquentations: Mon copain, leader de la bande  était " gay " et n'était que mon conseiller de mode! ( Ces jeunes gens étaient encore plus coquets que nous, les filles et s'habillaient toujours de façon " Fashion",  esclaves de la mode: chemises en mousseline ou en soie! ). Je ne lui servais que de " couverture", vis-à-vis des autres et de la société. Le jour où il voulait me parler de mariage, tout en étant amoureux d'un garçon du groupe, j'ai vite pris la poudre d'escampette! Et comme il avait beaucoup de succès auprès des filles, une autre est venue me remplacer de suite!


Ici a pris fin ma vie de citadine libre, joyeuse et moderne. L'arrivée des Nord-Vietnamiens a changé notre petit monde!


Et j'ai perdu ainsi le droit de rêver, de penser et de vivre librement. L'Enfer sur Terre!


AMOUR & MARIAGE 


Avez-vous jamais connu l'Amour qui transforme votre monde en rose, comme par magie? Tout est merveilleux et le Bonheur parfait!


Savez-vous que l'Âme soeur existe, mais rares sont ceux qui ont cette chance de la rencontrer? Quelqu'un qui voit, à  travers vos yeux, votre âme,  au plus profond de vous-même: Peu importe la différence d'âge, le physique... Une harmonie, une entente, une compréhension sans égale.


Mais il y a aussi des amours contrariés, à vous déchirer le coeur! Tout ça, à cause du Destin qui frappe à votre porte! Chance ou Malchance! 


Je me suis battue contre le mariage arrangé et j'ai dérangé le plan de mon père. Il a donné son accord avant de me consulter. Au départ, ma mère était du même avis que moi: le futur gendre " trop petit " et plutôt " moche"! Quand mon père commençait à manifester ses humeurs massacrantes vis-à-vis de la famille pour influencer l'opinion générale, elle a changé de camp et le " petit "  heureux élu est devenu aussitôt " intelligent et beau"!


Malgré mes efforts pour décourager mon prétendant, en insistant sur notre différence: d'âge, de mentalité..., j'ai obtenu l'effet inverse: je lui plaisais telle que j'étais: hippie ou arrogante!


Même en sachant mon départ définitif du Viêt Nam, il a continué à m'aimer: Un coeur voué au célibat jusqu'à ce jour, à cause de moi! Quel gâchis au nom de l'Amour! J'éprouve des remords envers tous ceux que j'ai pu blesser ainsi au cours de ma vie. Pardon: Que pourrais-je dire d'autre?


VIET NAM Ô PAYS BIEN AIME


Mon pays est sans doute le plus beau du monde, là où j'ai laissé tout mon passé, mes trésors de souvenirs: des lieux où j'ai passé toute mon enfance et ma jeunesse, des villes que j'ai visitées  , des plages de sable fin, des étés inoubliables....


J'ai beau cherché partout, à l'étranger, mais aucun endroit n'est comparable à Đà Lạt, la ville des amoureux. Ce cadre romantique est unique par la vue de la vallée toujours noyée dans la brume matinale. 


De Huê', malgré mon jeune âge, six ans tout au plus à l'époque, j'ai gardé l'empreinte de cette tristesse ressentie au plus profond de moi, lors des visites de Tombeaux Royaux. On dirait une sorte de communion avec mes ancêtres qui reposaient dans ces " Lăng"!


Je me souviens de mon émerveillement au cours d'une excursion à la Baie de Cam Ranh: Ce bleu saisissant de la mer contrasté avec l'étendue de sable blanc qui s'offrait à nous en haut d'une côte: Un spectacle paradisiaque!


Ma soeur et moi, nous nous rappelons encore aujourd'hui de notre bain aux Eaux Thermales " Suối Vĩnh Hảo". Une eau d'un goût assez spécial, " Pas terrible " selon l'avis de la gamine que j'étais!


Dans mes souvenirs, la pire ville c'était Phan Thiết réputée pour sa sauce de poisson " Nước mắm " dont l'odeur s'imprégnait jusqu'aux moindres recoins de cette localité. Phan Thiết a perdu aujourd'hui cette particularité, étant désodorisé!


ANNEES 60 - 70  LE TEMPS DES ECOLIERS, DE L'AMOUR, DES COPAINS ET DE L'AVENTURE


C'est le moment de dépoussiérer notre mémoire, de réveiller le passé pour vous rappeler certains souvenirs déplaisants!


LES BAGARRES EN CLASSE ET DEVANT LE COLLEGE FRANCAIS


A notre jeune âge, les surnoms collés aux camarades, ça paraissait tout à fait banal, voire normal même, puisque tel défaut méritait tel qualificatif - Exemple: Si par malheur, vous avez des oreilles de Dumbo, votre prénom sera collé à " oreilles d'éléphant " -"Tai Voi " ou si vous êtes née avec un sacré caractère, vous pourrez devenir une " Lionne de Hà Đông " - " Sư tử Hà Đông".


Voici l'histoire de nos antagonistes:


Notre héroïne a eu une querelle avec son camarade assis à la rangée derrière elle. Séchant sur un devoir et cherchant désespérément de l'aide, elle s'est retournée pour jeter un coup d'oeil sur la feuille du voisin en question. N'appréciant pas ce geste indiscret, notre Dumbo a vite caché son travail avec sa main, ce qui a rendu furieuse la fameuse Lionne de Hà Đông qui s'est vengée en jetant le plumier de l'autre sur le sol. Dumbo, les oreilles rouges sous l'effet de la colère, a réagi vivement en tirant sur la crinière - ou plus exactement la queue de cheval - de l'adversaire! Hou la la, un geste impardonnable qui a obtenu en retour une gifle retentissante. La suite était inévitable:Tous les deux se sont battus par terre et ont fini par être convoqués au Bureau!


Etant donné que les élèves du Collège Français faisaient partie d'une bourgeoisie nantie, ça attirait des ennuis avec ceux du Lycée voisin -  Võ Tánh.


Ce qui a déclenché une agression devant l'école: Un certain lycéen borgne venant chercher la bagarre avec sa bande, sous prétexte de demande de l'argent pour des cigarettes, a attaqué un des nôtres. Par solidarité, les autres du CF ont intervenu et la bagarre a tourné court à la sonnerie des classes. A la sortie des cours, le groupe de  Võ Tánh était là, pour continuer cette rixe. Malgré l'aide d'un camarade du CF - ceinture noire en Tae Kwon Do, les agresseurs ont quand même fait une victime parmi les nôtres en la poignardant par derrière! 


COIFFURE RATEE & EXAMEN DE FIN D'ANNEE


Petite, j'aimais accompagner mon père dans sa quête de livres rares, anciens, d'occasion ou neufs. Notre bibliothèque s'enrichissait de jour en jour grâce à nos trouvailles - C'est dommage qu'à l'arrivée des communistes, nous avions dû brûler une grande partie de notre trésor de lecture. J'ai participé à contre-coeur à cette destruction massive de la littérature soi-disant " đồi trụy "  ( produit d'une société corrompue et d'une vie dissolue ), en visitant chaque maison des quartiers avoisinant notre faculté. Mon coeur était en peine devant ces oeuvres parties en fumée, dans les flammes de cette folie humaine au nom d'une idéologie!


A cause de cette passion pour les livres, j'ai passé mon temps dans les librairies de Sài Gòn, mes lieux de fréquentation de prédilection au lieu d'assister aux cours universitaires. J'étais trop cool dans mes études! " Nước đến chân mới nhảy".


J'attendais toujours la dernière minute pour appeler mes amis à l'aide en empruntant leurs cours pour la révision avant l'examen.


A cette époque, je portais des cheveux mi-longs - d'un noir tellement intense qu'une étudiante m'a accostée pour me demander si c'était dû à la teinture! Un jour, à cause de la chaleur étouffante de l'été, j'ai pris des ciseaux et sacrifié cette belle chevelure sans aucune hésitation. J'ai coupé sans m'arrêter pour constater enfin que j'ai causé des dégâts terribles: un espace vide, comme le désert d'Arabie au sommet de mon crâne! Que faire, à la veille de mon examen de fin d'année? Dans cet état, il valait mieux ne pas me présenter à la faculté! Passer ou ne pas passer l'examen, that's the question! Dépitée par mon triste aspect à cause des cheveux saccagés, j'ai fait appel à un coiffeur pour arranger du mieux qu'elle pouvait! En rigolant, elle m'a proposé une coupe à la GI Jane ou presque, car elle m'a laissé une petite épaisseur de cheveux pour faire oublier ma petite tonsure au sommet! C'était ainsi que j'ai passé mon examen, la main sur ma tête, sous le regard malicieux et avec les petits sourires en coin de mon professeur, amusé par ma situation embarrassante! Malgré ma coiffure ratée, j'ai réussi mon Certificat avec mention: Ouf, quel soulagement!


FILLE AU PAIR


A mon arrivée en France, j'ai trouvé une place de Fille au pair grâce aux amis de mon frère. Nous n'avions pas le choix, mon frère ne pouvait pas m'héberger dans son petit studio, au campus universitaire.


Je devais aller chercher deux petits enfants à l'école en échange d'une chambre, au fond du jardin d'une coquette villa, en banlieue parisienne. Mes petits protégés, Nicolas et Julie, de beaux Eurasiens, vivaient avec leur mère Française après le divorce des parents. A leur contact, je commençais à changer mes habitudes vietnamiennes en m'adaptant à leur façon de vivre: en premier, la cuisine. Leur mère faisait les courses, préparait le menu chaque jour, me laissant le soin de faire les plats à ma façon. J'étais vraiment dans l'embarras le premier jour, face au poisson précuit. J'ai dû forcer mon imagination à travailler en utilisant les ingrédients mis à ma disposition et j'ai mélangé mes connaissances culinaires à cette nouvelle cuisine pour faire plaisir à la famille d'accueil. Le plus dur moment de la journée, c'était l'heure du bain: Comment faire sortir la petite Julie de la baignoire quand elle adorait jouer dans l'eau et aimait traîner le maximum? A la fin, j'ai trouvé la solution en vidant la baignoire, malgré ses cris de protestation et de colère.


Comme je ne pouvais voir mon frère que le week-end, à cause de la distance qui nous séparait, d'une banlieue à une autre, complètement à l'opposé, je disposais de mon temps libre et j'ai accepté de faire un peu de travaux ménagers pour recevoir en contrepartie, une carte de transport de plusieurs zones. La plupart du temps, je quittais mon service tard le vendredi soir pour rejoindre mon frère. Le long trajet en RER m'a souvent vue m'assoupir dans le train jusqu'à l'arrêt! Et je devais faire une petite marche jusqu'au campus, dans les rues désertes, à ces heures tardives. C'était ainsi qu'une nuit que je devais engager une course folle pour échapper à un admirateur qui me poursuivait en voiture. J'ai pris des sens uniques mais il devait deviner vers où je me dirigeais, car il m'attendait vers la direction de l'Université J'étais nulle dans les épreuves sportives à l'école primaire, mais ce soir-là, j'ai battu mon propre record en course en regagnant le campus avant mon poursuivant!


Devant mes prouesses en cuisine, Mme T. la mère des enfants, m'a demandé de lui préparer un repas en l'honneur d'un invité. Une fête qui a failli tourner au drame, à cause de mon ignorance, en matière de cuisine! J'ai vu une marmite en fonte pour la première fois de ma vie et j'ai utilisé un grand bol en verre pour y faire cuire mon plat, comme une cocotte actuelle! Au moment où j'ai soulevé le couvercle, l'explosion du bol a projeté mille morceaux en l'air, me manquant de près! J'ai failli être truffée d'éclats de verre, surtout à la figure! 


Mon principal plat était ruiné, à cause des projections. Mais Mme T. ne se résignant pas à jeter une si bonne viande à la poubelle, a décidé de la servir quand même après avoir nettoyé les dégâts!


Devinez ce qui s'est passé à table, ce soir-là? L'invité était le seul à tomber sur un petit éclat de verre en mangeant avec bon appétit! On a dû lui raconter ma mésaventure de cuisinière au milieu des éclats de rire!


J'ai toujours été épatée par la résistance des enfants au froid: En hiver, alors que je me réfugiais dans ma chambre, toutes fenêtres fermées, le chauffage mis à fond, tous les deux dormaient nus, sous la couette, dans leurs lits placés contre la fenêtre ouverte!


Le jour où j'ai décidé de quitter cette place de Fille au pair pour reprendre mes études, je commençais à avoir des ennuis avec Mme T. qui ne me laissait plus l'accès libre à la maison en fermant toutes les portes. Le matin, avant de sortir, pour pouvoir faire ma toilette, j'ai dû escalader jusqu'au premier étage et entrer par la fenêtre - comme par effraction!


Ma petite puce, Julie, a ressenti ma tristesse et m'a prise dans ses bras pour me consoler, avant mon départ.


Chers Nicolas et Julie, merci pour votre affection qui m'a fait chaud au coeur, et encore jusqu'à maintenant!


ALLERGIES & VACCINS


C'était au cours de ma première sortie en forêt en France que j'ai eu droit à ma deuxième crise d'allergie. J'ai été mise K.O dès les premières minutes qui déclenchèrent éternuements et larmes.


Et c'est devenu une allergie chronique au cours des années. Mais grâce au contact des cristaux, j'ai réussi à m'en débarrasser depuis quelques années.


Mon premier symptôme d'allergie s'est manifesté dans mon enfance, à cause d'une vaccination!


J'étais comme prise d'une crise de folie à m'agiter tant que j'ai ressenti des fourmillements partout, sur tout le corps!

On a dû me ramener d'urgence au cabinet médical pour m'injecter l'antidote!


C'est pour cette raison que mon carnet de vaccinations ne sera jamais à jour. 


Je préfère ma méthode naturelle, la Lithothérapie pour me préserver des microbes: La Grippe, je ne la connais pas jusqu'ici. 


A part ma maladie génétique paralysante, je me porte plutôt bien: Mon Médecin traitant s'est plaint de ne plus jamais me voir depuis ma dernière crise d'allergie.


LA CUISINE & MOI


Depuis mon arrivée en France, j'ai eu très peu d'occasions pour faire des plats vietnamiens, d'une part mon logement trop loin du marché asiatique - quartier chinois du 13 ème ou Belleville... et d'autre part, la cuisine express me convenait mieux, faute de temps et surtout, à cause de la paresse et du manque de motivation.  


J'ai dû me contenter d'une cuisine " adaptée": des plats arrangés selon les moyens du bord! Plus le temps passe, plus l'envie me prend de revenir à notre cuisine traditionnelle, de goûter de nouveau aux plats du pays: un retour aux sources,  par nostalgie sans doute!


Un jour, à la demande de mon Chef - trop tenté par la cuisine asiatique - j'ai accepté d'organiser un grand buffet pour tout le service. J'ai prévu une multitude de plats, vu le nombre de convives. Mon programme étant bien chargé, j'ai procédé selon mon planning. Malgré mes prévisions, j'ai failli oublier de faire cuire mes pinces de crabe - CUA RANG MUỐI. C'était la panique à bord, une course contre la montre, pour tout finir à temps!


Malheureusement, un de mes plats principaux, le Canard laqué m'a fait faux bond, à la sortie du four! Il a fait un vol plané et ruiné mon plan! Le comble, ce canard de malheur était trop gras,  même au bout de tant d'heures de préparation et de cuisson! A mon avis, il fallait prendre un canard dépourvu de graisse, acheté plutôt dans les magasins asiatiques!


J'ai fait des Pâtés impériaux - Chả giò, Nem - pour le plus grand bonheur de mes collègues qui en raffolaient.


Une collègue Vietnamienne m'a donné un coup de main pour le Riz Cantonnais- Cơm Thập Cẩm. Le reste, chacun pouvait apporter quelque chose: une salade, un gâteau ou des fruits, selon son envie.


L'absence de mon canard n'a pas manqué à mon repas, vu la profusion de nourriture à table. C'était un instant de bonheur partagé, dans la joie et la bonne humeur, inoubliable pour nous tous! Un vrai succès! J'ai même reçu des commandes  .


J'ai remarqué que, parmi nos spécialités, mes collègues Français adorent en général, ces plats: Phở,  Bò Bún, Chả Giò...


LES SPORTS D'HIVER 


Paris m'a accueillie pour la première fois dans la grisaille de l'hiver. La vue de la capitale m'a déçue profondément: de l'aéroport jusqu'à mon adresse provisoire, des immeubles modernes,  rien de plus! Plus tard, après avoir connu d'autres villes d'Europe, j'ai commencé à apprécier le vieux Paris, tous les monuments le long de la Seine... Complètement tombée sous son charme! Séduite par son architecture et sa splendeur  !


Avec le gel,  des chutes de neige en signe de deuil de la Nature, ensevelie sous une épaisse couche d'une blancheur immaculée.


La neige me faisait penser à la Mort, à l'époque: ce qui était compréhensible, vu ma tristesse,  loin de ma famille et de mon pays. Mon humeur a déteint sur mon goût vestimentaire: que du gris et du noir!


J'ai pris un emploi à mi-temps tout en continuant mes études. Et mon patron nous a offert un week-end aux sports d'hiver en Suisse, hôtel 4 étoiles. 


Mon initiation au ski alpin:


Mauvaise surprise au moment de mettre les chaussures de ski qui vous donnent l'allure et la démarche de Robocop! 


Mon chef de service m'a invité à descendre une pente, histoire de vérifier mon niveau de débutante et j'ai eu droit à une sérieuse remontrance après, car il avait une belle frayeur de me voir dévaler la piste sur les fesses, en vrai casse-cou quoi!


Le Tire-fesses m'a donné du fil à retordre aussi! Désarçonnée dès la moindre erreur!


Sans complexe, j'ai suivi les autres partout. A un moment, je me suis retrouvée toute seule et j'ai dû me débrouiller pour skier tantôt descendre une piste tantôt traverser une pente de montagne en évitant de tomber dans les ravins en dessous! J'ai réussi à rester sur mes skis et j'ai même freiné à temps pour ne pas enfoncer la porte d'entrée d'une petite cabane, heureusement déserte!


La montagne m'a revue depuis sur les pistes de différentes stations d'hiver, même les pistes rouges et noires!


A Courchevel, j'ai participé à une descente aux flambeaux, après le Ski Show organisé par la station. 


Dans l'obscurité totale, sur des pentes verglacées, à la queue leu leu, avec la consigne de rester à un mètre de distance l'un de l'autre: ce qui était difficile à respecter pour ceux qui n'étaient pas habitués au verglas et la moindre faute fera de nous une torche humaine. Ma chevelure longue représentait un véritable danger et je devais redoubler de prudence pour éviter la catastrophe!


J'ai toujours peur des hauteurs et les routes de montagne me donnent le vertige! Le ski m'a permis de surmonter mes faiblesses.


KAMIKAZE WOMAN


Je suis un véritable danger public dès qu'on me laisse un engin motorisé ou un volant entre les mains!


C'est comme ça que j'ai causé un accident à Sài Gòn, avec ma Honda, juste devant un hôpital, par ironie du sort! 


Ne sachant pas conduire, j'ai heurté un cycliste et lui ai fait plus de peur que de mal. Mais moi, j'ai eu droit à quelques points de suture quand même!


Un jour, sur une route de campagne - en France - on m'a proposé une leçon de conduite. Le hic, c'était que la voiture - une DS, ne me convenait pas côté taille - hauteur: Du siège de conducteur, je ne voyais rien de la route! Comment faire alors? J'ai trouvé le moyen de rouler, à l'aveuglette, en me fiant aux arbres le long de la route: Il suffisait de rester au centre! Par chance, aucune circulation dans les deux sens, sinon j'aurais provoqué un grave carambolage, ma foi!


FIGURANTE D' UN JOUR


Parmi les pays visités, la Tunisie m'a été le plus cher par le contact chaleureux des habitants, les souvenirs d'heureuses vacances familiales... 


J'y ai même été figurante dans un feuilleton italien. La sélection a été faite dans les hôtels - parmi les touristes- par l'équipe de tournage. Les employés de l'hôtel étaient choqués de voir mon cachet -rien que pour quelques heures - équivalent à un mois de leurs salaires.  


Entre les scènes, on se dorait au soleil, profitant du lieu du tournage: au bord de la plage et en prime: le déjeuner offert sous forme de buffet. 


L'animateur de l'Hôtel-Club s'est moqué de mon talent d'actrice en me présentant à son public comme étant choisie par le réalisateur du film chinois " Le Dernier Empereur"!!! S'il savait que la scène serait sans doute coupée, il aurait été bien déçu d'avoir pris tant de peine à faire de la publicité pour mon compte!


La première fois que j'ai mis les pieds sur le sol Tunisien, à Djerba, j'ai été gardée par la Douane, à la descente de l'avion, empêchant ainsi tout le groupe de collègues- invités par une société de marque à un week-end- de regagner notre hôtel. Pour la simple raison qu'ayant été choisie à la dernière minute pour ce voyage, j'ai oublié le plus important: un visa d'entrée! 


Finalement, après une heure d'attente et de causette avec les douaniers, au lieu de me renvoyer en France, ils m'ont permis de rejoindre les autres,  avec une promesse de visa pour quinze jours.


L'AMOUR D'UNE MERE


Née dans une famille bourgeoise, j'ai connu plutôt les services des servantes que la tendresse d'une mère. A l'âge d'adolescente, j'ai gardé le souvenir de ma mère en visite à l'hôpital où nous étions admis - plusieurs enfants malades en même temps! Des nuits passées à veiller sur nous!


Les derniers-nés de la maisonnée ont eu plus de chance: N'ayant plus de bonnes, ma mère devait s'occuper d'eux elle-même! 


Je me souviens des visites à la clinique pour chaque naissance, du régime spécial de ma mère après un accouchement, des précautions à prendre pour préserver sa beauté. 


C'était l'époque des serviettes de linge à changer au lieu de couches-culottes actuelles pour les bébés. 


Ma mère a eu un enfant mort-né: Très jeune moi-même et en visite, j'ai pu voir le beau bébé qu'on a emporté dans un petit cercueil, anonyme, en cyclo-pousse, sans autre forme d'adieu! Pas de nom, pas d'existence, aucun souvenir, car la vie continue...  Pauvre petit frère, je ne t'ai jamais oublié depuis ce jour là: Tu étais beau comme un ange, endormi  pour l'éternité!


On n'a jamais parlé d'autres enfants qu'elle a perdus: l'Aînée - ma soeur disparue à l'âge d'un an...


Chère Maman,


Même si je t'ai toujours tenu tête, depuis mon enfance - fille rebelle - j'ai gardé de précieux souvenirs dans mon coeur: 


Une jolie maman, une garde-malade dévouée et une mère bonne cuisinière!


Et puis un jour, moi aussi, je suis devenue une mère. Loin de mes parents et de mon pays, j'ai dû élever mes enfants seule, dans nos traditions, tant bien que mal. Pour m'apercevoir à la fin que j'ai lamentablement échoué, car j'ai beau inculqué des principes, je ne pouvais pas changer les caractères: la générosité ne s'apprend pas, on l'a ou on ne l'a pas,  l'égoïsme peut tout détruire...


Ma fille, un jour viendra où tu devras assumer ce rôle à ton tour. J'espère que tu sauras enfin ce qu'est l'Amour d'une mère. Il sera sans doute trop tard pour me dire " Maman, pardonne-moi pour tout le mal que je t'ai fait!"


Tiên Sa



© cfnt, Collège Français de Nha Trang