Championne, mais il n’y avait pas de quoi d’en être fière, je vous le dis, car j’étais championne de la triche. Mais je n’étais pas la seule en classe dans cette catégorie…d’épreuve sportive, hi hi. La triche, un sport, pourquoi pas? Vous allez voir comment je devais me triturer les méninges, dans l’espoir de trouver l’endroit idéal pour cacher mes petites notes à chaque interrogation, à chaque examen! Je n’ai jamais fait travailler autant mon cerveau de ma vie que pendant ma période de scolarité, je dois l’avouer! Et avec le temps, mes efforts ont porté leurs fruits, je me suis améliorée d’année en année, parole de tricheuse! Hélas, malgré le proverbe « Aide-toi, le Ciel t’aidera » - je l’ai bien appliqué, seulement le Ciel m’a joué de mauvais tours – j’ai dû redoubler ou avoir juste la limite, mais vraiment limite pour décrocher un diplôme! Diplôme? A mon avis, j’aurais dû recevoir une médaille en décoration, pour avoir réussi en cet art - art ou sport – de la triche!!! Jamais je n’ai fait un devoir, alors pourquoi m’avoir accordé un diplôme? Messieurs les Académiciens, je sais bien lire et écrire mais vos programmes scolaires ne m’ont servie à grand-chose, je n’ai fait que copier et recopier à longueur d’année! Voilà, soit je copiais en jetant des coups d’œil sur la feuille de ma voisine (si elle était d’accord), soit je me faisais mes petits rouleaux – pas des rouleaux de printemps ou des pâtés impériaux, s’il vous plaît mais des antisèches, des heures de travail minutieux à l’écriture de mouche, un véritable travail d’artiste quoi! Il m’est arrivé d’écrire des notes sur mes cuisses (Un conseil: Inutile de porter des mini jupes, il n’y avait pas assez de place pour noter quoi que ce soit!), dans la paume de ma main, sur les bras…Le moment propice pour opérer? C’était quand le professeur passait devant ou après ma table. Derrière son dos, prestement je sortis mon antisèche pour le cacher dans ma paume. Une fois, j’ai eu le malheur de demander service à une fille assise à côté de moi, en lui proposant quelques boîtes de conserves américaines en échange. Quelle idiote j’étais car non seulement j’ai perdu mes précieuses boîtes mais en plus, je suis devenue un sujet de ragots à cause d’elle, le maudit «téléphone arabe»! Si par malheur, j’étais placée à côté d’une camarade qui ne voulait pas qu’on ait le même résultat, identique mot pour mot et qui cachait sa feuille de ma vue, il ne me restait plus que l’option d’inventer au mieux pour éviter le double zéro catastrophique. Grâce à des années d’expérience, je n’ai jamais échoué, ni été prise sur le fait. Le plus difficile dans la tricherie, c’est de savoir quelle méthode qu’on doit appliquer, quelles parties de leçons jugées importantes à noter, d'y penser la veille de l’examen. C’est encore plus dur à tricher qu’à apprendre vos leçons, à mon humble avis! Il faut apprendre à gérer son stress, bien dormir la nuit pour être d’attaque le lendemain. Il faut surtout garder son sang-froid pendant l’action pour ne pas se trahir et attirer l’attention du professeur. Mon œil expert arrivait à repérer facilement les tricheurs pendant l’examen sans me faire découvrir. HY mon copain de classe avait triché en Sciences Naturelles et il s’est fait attraper par Mr Lagarde. J’y ai échappé belle, car prise en flagrant délit avec des antisèches, je risquerais la porte à coup sûr! HY avait reçu une sanction de discipline par Mr Le Directeur, quelques semaines quand même et depuis, il avait pris en grippe le professeur. Tant d’années déjà passées, sa rancune toujours tenace, car à l’occasion d’une visite à Paris, je lui ai proposé d’aller voir Mr Lagarde ensemble, mais il m’a opposé un net refus. Elève, j'ai gardé plus de souvenirs des heures de récréation, de tendres moments de complicité avec des copines, de bavardages, de facéties d'adolescentes que de cours avec tel ou tel professeur. C'est possible que c'était dû à mon manque de motivation, mon attention s'évadait toujours... A quelques pas de là, une plage de sable fin, une eau bleu azur... Et je divague... la championne du CF divague toujours... Quel passé glorieux! Lê Thị Lam Sơn |
© cfnt, Collège Français de Nha Trang